vendredi 29 mai 2009

Ils me haïssent...

Les gens me haïssent.

Ils se rassemblent sur des sites internet comme on se rassemblait dans les salons durant le siècle des lumières. Persuadés d'avoir de l'esprit, ils se réunissent pour me haïr et échafauder minutieusement des plans de haine efficaces. C'est comme ça depuis mon enfance. (écho dans ma voix - fondu flouté et bruits de scintillements féériques = flashback)

Comme vous le savez les enfants sont idiots et cruels. Par conséquent je fus maintes et maintes fois pourchassé par mes camarades dans la cour de récréation (oui c'est moi là, le jeune garçon qui court au premier plan). Parfois je trouvais refuge dans les branches touffues d'un tilleul, c'est alors que les petits diables s'en donnaient à cœur joie: jet de pierres, de gommes, de ciseaux et d'excréments parfois. On aurait juré que leur énergie d'enfant hyperactif était canalisée vers un seul objectif; me faire du mal.
Chaque fois que je m'apprêtais à descendre un escalier, soit j'étais poussé, soit j'écopais d'un croc en jambe. Plusieurs fois je fus prompt à me rompre le coup, par chance je m'en tirais. Mes autres membres, eux, souffrirent de multiples fractures aussi diverses que nombreuses tout au long de ma scolarité. A la cantine on me jetait des verres à la figure, puis une fois que les verres se brisaient dans un éparpillement d'éclats tranchants, d'autres se précipitaient pour ramasser les tessons et m'entailler les mollets, les genoux et les joues...

Je n'ai jamais vraiment compris les motifs justifiant cette hostilité. J'étais discret et poli, aussi doux et innocent qu'un dauphin portant une coiffe d'indien. Vingt années de ce traitement ont fait germer en moi les graines de la vengeance. Les vingt années qui suivirent, j'ai décidé de disparaître. Vingt années de chômage, de persécution, d'inactivité sexuelle et de vie dans les égouts, recueilli par un couple d'alligators, qui m'ont réduit à l'état de prédateur ivre de machinations macabres.
Car si j'ai disparu de la surface de la terre pendant tout ce temps, les gens n'ont cessé de me haïr, et aujourd'hui encore ils guettent mon retour, prêt à en découdre, les ongles longs et les dents limées. Mais ils ignorent que celui qu'on appelait "Couilles en pointe" est désormais devenu: "La larme du crocodile".

Désormais je ne sors que la nuit, recouvert de mon armure d'écailles, confectionnée après la mort de Josie, ma mère putative. Grâce à cet artefact, je joui d'une quasi invulnérabilité qui me soutient dans l'accomplissement de mes méfaits. Je passe mes nuits à déplacer les cacas canins depuis les caniveaux vers les trottoirs, à remplir les boîtes aux lettres de prospectus et de lettres de lotterie gagnantes. Parfois avant de sortir, je téléphone aux gens (en suivant l'annuaire) et leur demande de répondre à des sondages sur des produits cosmétiques. Lors de mes rares apparitions diurnes, je me pare de mon plus beau boubou et peins mon visage en noir. Ainsi camouflé je me rend à Barbès pour y distribuer ma carte de visite: "Dfiscel, Marabout". Lorsque les gens téléphonent, ils pensent pouvoir régler leurs problèmes érectiles ou retrouver un de leur proche disparu, mais ils tombent sur.....un numéro non attribué: Machiavélique.

Chaque fois un peu plus, je tisse ma toile sur l'ensemble de la planète, une toile solide et collante à laquelle personne ne peut échapper. J'ai investi toutes les sphères du pouvoir et suis en pourparler pour racheter la chaîne de magasins GIFI. Lorsque ce sera accompli, le monde sera sous ma coupe. Il patira de mes lampes de poches qui ne fonctionnent pas, de mes nains de jardin en plastic, de mes sets de tables imprimés de scènes religieuses, de mes têtes de cerfs (en plastic aussi) décoratives. La liste est longue mais je me dois de conserver un semblant de suspense.

Je vais m'appliquer à renvoyer l'ascenseur à toutes ses personnes qui m'ont un jour torturé. "Couilles en pointe" a muri, et "La larme du crocodile" n'est pas prête de mettre à frein à cette mécanique infernale. La roue a tourné, le jeu doit continuer.

Votre serviteur reptilien, j'ai bien nommé "La larme du crocodile".

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VDM